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BA1 2006-2007 travaux d'encyclo
7 janvier 2007

Etude du Symbole des Apôtres catholique

Travail pour le cours de monsieur Timmermans :

Encyclopédie de la philosophie

Roisin Olivier


Etude du Symbole des Apôtres catholique

Notre travail aurait pu s’arrêter à la lecture de Jean Paul II : « L’Eglise ne propose pas sa propre philosophie, ni ne canonise une quelconque philosophie particulière au détriment des autres »[1]. Cependant notre désir de mieux comprendre la chrétienté au travers de ses dogmes s’est trouvée réconfortée par le même ouvrage : « Le théologien (…) doit aussi connaître en profondeur les systèmes philosophiques qui ont éventuellement influencé les notions et la terminologie »[2]. Nous ne disserterons pas sur cette apparente contradiction du célèbre Fides et Ratio, mais tenterons d’étudier les dogmes chrétiens au moyen de ce qui semble être leur instrument de divulgation principal : le Symbole des Apôtres[3]. Notre but est ici de tenter de mettre à jour la philosophie sous tendue par l’écrit dogmatique. Nous avons d’abord cherché dans l’histoire de sa conception mais cela ne permettait pas un débat réellement contemporain. Nous nous sommes donc mis en quête d’autres grilles de lecture du texte.

Comme nous le disions, l’étude historique[4] ne permet pas le débat. Elle montre que le credo a été conçu comme une arme à l’égard des païens, des gnostiques ou des Juifs. L’apprentissage obligatoire lors de la communion solennelle de cet écrit semble, de ce point de vue, tout à fait absurde : pourquoi obliger les croyants à perpétuer une arme (voire le combat) qui vise ce contre quoi il n’y a désormais plus lieu de se battre ?

Face à cet écrit, on pourrait reposer toutes les questions qui se sont posées au cours de l’histoire de l’Eglise. On pourrait constater  que la trinité défendue par le Symbole[5] va à l’encontre de ce que prônaient les Pères de l’Eglise. Plus généralement, on pourrait constater que le Dieu d’antan n’est plus celui d’aujourd’hui, que tout n’est que changement d’interprétation des textes. Cependant, comme nous l’avons déjà signalé, cela n’apporterait pas de grand élément à notre réflexion philosophique à propos du credo d’aujourd’hui.

L’étude du texte proprement dit s’avère beaucoup plus constructive dans le cadre que nous nous sommes fixés. Remarquons d’abord que tout est centré sur la personne de Jésus. Ce serait logique si on oubliait que le titre est complètement erroné du point de vue historique. On parle du Fils, ou plutôt de sa naissance, de sa mort, puis de sa résurrection, mais on ne mentionne aucun élément de sa vie qui constitue, tout de même, l’élément fondateur des religions chrétiennes ! On parle de la vie comme si elle n’était qu’une salle d’attente vers le paradis : celui-ci semble être l’issue quoi qu’on fasse. L’enfer est conçu comme purgatoire plutôt que comme lieu de séjour éternel à l’instar du paradis. La dualité véritable bien/mal n’est donc pas présente dans ce texte.

D’autres personnages apparaissent néanmoins et leur analyse corrobore notre hypothèse. Les croyants sont appelés à croire au Saint Esprit en échange de quoi il semble devoir gagner un « ticket gratuit » pour le paradis. Pilate et Marie ne sont mentionnés que dans le cadre d’un rapport unique au Christ (la naissance pour la Vierge et la souffrance pour Pilate).

La vie de Jésus, chacun le sait, constitue un exemple à suivre pour les Chrétiens. Le texte stipule sa conception, sa naissance, puis il montre sa décadence (de la souffrance à l’enfer) pour terminer par une remontée spectaculaire sur l’échelle du bonheur vers le paradis (dont on ne connaît absolument rien). Ceci voudrait-il soutenir la thèse ascétique emplie d’espoir ? Faut-il souffrir pour ensuite accéder au bonheur suprême ? Nous laissons le soin de la réponse aux nombreux philosophes et théologiens qui se sont penchés sur la question et nous nous contentons ici de constater que le Symbole des Apôtres pose la question.

La structure même du texte apporte aussi matière à réflexion. L’écrit se découpe en trois paragraphes dont la longueur diminue progressivement. Le dernier est éloquent. En effet, ce simple « Amen » semble être posé comme le résumé, la conclusion logique, de tout ce qui vient d’être dit. Pour affirmer sa foi, il suffit de prononcer ce simple mot : il constitue logiquement l’essentiel du contenu. Remarquons la répétition, en Français, de ce terme au début des deux paragraphes précédents. Il s’agit donc aussi d’un élément formellement structurant.

A sa lecture, le texte ne laisse apparaître aucun souci pédagogique à l’égard du chrétien : le souhait principal du texte est la croyance « aveugle », sans compréhension des dogmes. En quelque sorte, le croyant dit « oui » à des choses qui le dépassent. On enseigne le Symbole à des enfants de douze au treize ans : sont-ils seulement capables de comprendre, de décoder ce qu’ils récitent en chœur ? En somme, alors que l’interprétation des textes se trouve souvent modifiée, la manière de procéder de l’Eglise semble inchangée : attirer les foules à n’importe quel prix, y compris celui de l’ignorance.

Jésus offrait un magnifique message à ses contemporains. Pour le comprendre aujourd’hui, il faudrait redresser le mythe[6] et offrir les clés de lectures nécessaires à leur compréhension. Or pour Jean Paul II, a philosophie ne doit être pratiquée que par les théologiens comme si une communauté chrétienne savante risquait de menacer trop profondément la sacro-sainte tradition antique.

L’écrit dogmatique n’offre pas les clés de lecture que l’on pourrait attendre de lui. Quand on parle de l’histoire de la religion, on aboutit vie à des conclusions de stratégies de séduction. L’étude de la conception n’apporte donc pas de réelles corrélations avec le message pacifique du Christ. En outre, le credo sous-tend, presque insidieusement, la conception d’une vie d’espérance et d’ascèse. En conclusion, le credo ne peut ni se revendiquer « résumé des dogmes catholiques »[7], ni prétendre offrir une aide pédagogique aux jeunes croyants.


[1] Jean-Paul II (pape), La foi et la raison, Lettre encyclique Fides et Ratio, Paris, éd. du cerf, 1998, chapitre V, §49, p.67. 

[2] Ibid., chapitre VI,  §65, p. 86.

[3] Cf. annexe 1: le Symbole des Apôtres.

[4] Cf. annexe 2: histoire détaillée de l’insertion des dogmes les plus importants dans le Symbole des Apôtres.

[5] Cf. versets 1, 3 et 5.

[6] Cf. Couloubaritsis L., Les grands courants de la philosophie de l’Antiquité au Moyen Age, Bruxelles, Presses Universitaires de Bruxelles, 2006.

[7] Expression tirée de : Liégé P., Christianisme, in www.universalis-edu.com [en ligne], consulté le 06/12/2006.


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Commentaires
L
Comme moi, M. Timmermans a pensé que mon travail n'était pas assez axé philo. Je lui ai expliqué mes difficultés rencontrées : j'ai fais de l'histoire, puis de l'étude de texte et lui pense que j'aurais du partir de l'affirmation de JEan Paul II quand il dit qu'une communauté chrétienne savante nuirait sans doute à l'équilibre de l'Eglise.<br /> <br /> Il a jugé ma recherche bibliographique très bonne mais pas bien notée. En effet, j'avais ouligné les titres plutôt que de les mettre en ittalique et pour les sources tirées d'internet : c'était clairement n'importe quoi (norma puisque je ne m'étais pas relu avec son syllabus à côté !).<br /> <br /> Il m'a mis 8.5/10 ... Note que je ne pensais pas avoir du tout vu tout ce que je viens de dire. Il m'a dit que ça s'expliquait par la qualité de mon écriture [:-)] (entre autres évidemmment !) et, notamment, le travail que j'avais visiblement fourni. Il m'a donné 4.5/5 pour les indications bibliographiques vu les erreurs de notations (mais je suis resté cohérent avec moi-même et c'est pour ça qu'il n'a retiré qu'un demi point sans doute !). et donc 4/5 pour le contenu proprement dit ;-)
L
Albert F., comte de Goblet d’Aviella, L’évolution du dogme catholique, Paris, E. Nourry, 1912-1914.<br /> <br /> <br /> Bougaud E. (Mgr), Les dogmes du credo, tome 3 in Le christianisme et les temps présents, Paris, C. Poussielgue, 1921.<br /> <br /> <br /> Centre d’études historiques de Fanjeaux, Le credo, la morale et l’inquisition, Toulouse, E. Privat, 1971.<br /> <br /> <br /> Coquerel A.J., Histoire du credo, Paris, G. Baillière, 1869.<br /> <br /> <br /> Couloubaritsis L., Les grands courants de la philosophie de l’Antiquité au Moyen Age, Bruxelles, Presses Universitaires de Bruxelles, 2006.<br /> <br /> <br /> Draguet R., Histoire du dogme catholique, Paris, A. Michel, 1991.<br /> <br /> <br /> Farel G., Le Pater Noster et le Credo en Françoys, publié d’après l’exemplaire unique nouvellement retrouvé par Higman F., Genève, Droz S.A., 1982.<br /> <br /> <br /> Gaboriau F., Philosopher à l’appel de Jean Paul II, Paris, Fac-éditions 2000, 1999.<br /> <br /> <br /> Hébert M., L’évolution de la foi catholique, Paris, F. Alcan, 1905.<br /> <br /> <br /> Jean-Paul II (pape), La foi et la raison, Lettre encyclique Fides et Ratio, Paris, éd. du cerf, 1998.<br /> <br /> <br /> Kamp J., Credo sans foi, foi sans credo, Paris, Aubier Montaigne, 1974.<br /> <br /> <br /> Liégé P., Christianisme, in www.universalis-edu.com [en ligne], consulté le 06/12/2006.<br /> <br /> <br /> Marin Sola F., L’évolution homogène du dogme catholique, Fribourg (Suisse), Librairie de l’œuvre de Saint Paul, 1924.<br /> <br /> <br /> Maurice S., Le catéchisme de Jean Paul II, Genèse et évaluation de son commentaire du Symbole des Apôtres, Leuven, Presse universitaire de Louvain, 2000.<br /> <br /> <br /> Miéville H.-L., Foi et credo, Neuchâtel, La baconnière, 1964.<br /> <br /> <br /> Pélikan J.J., La réforme de l’Eglise et du dogme, volume 4 in La tradition chrétienne : histoire du développement de la doctrine, Paris, Presse Universitaire de France, 1994.<br /> <br /> <br /> Société biblique française, Traduction Œcuménique de la Bible, Paris, du Cerf, 1988.<br /> <br /> <br /> Wieland C.M., Pensée sur la liberté de philosopher en matière de foi, Paris, Ladrange, 1844.<br /> <br /> <br /> Le symbole des Apôtres, in www.scouts-europe.org [en ligne], consulté le 22 octobre2006.<br /> <br /> <br /> Symbole des Apôtres, in Missel des Dimanches, édition collective des éditeurs de liturgie, Paris, 2005, p. 19.
L
Ce travail se base sur l’histoire du credo qui n’est pas partie intégrante de beaucoup de cursus universitaires. Il nous parait donc essentiel, pour simplifier la lecture du présent travail, de la relater de façon assez concise. En effet, ceci n’est qu’une très brève synthèse de tout ce que nous avons pu lire dans les divers documents renseignés en troisième annexe. L’objectif de ce qui suit est d’étudier l’apparition des termes du dogme catholique, les circonstances de sa création. Nous ne nous sommes donc pas intéressés à l’exploitation qu’on en a pu faire au cours des siècles. Quoique passionnante, cette tâche nous semblait irréalisable étant donné notre peu de connaissance en la matière de l’histoire de la théologie générale.<br /> <br /> <br /> Après Jésus, on observait trois grandes catégories de croyants : les païens qui respectaient le culte antique national impérial, les juifs baignant dans leur tradition d’exclusivisme de race et de doctrine et les tout nouveaux chrétiens. Ils devaient professer leur foi au Christ en se démarquant de leur ancienne religion : « Jésus, fils de Dieu » pour les Juifs et « un seul Dieu » pour les païens. On ne s’étonnera donc pas de l’influence de ces deux croyances sur le christianisme naissant. <br /> <br /> Le credo se forma de 250 à 550 PCN à peu de choses près. Le Symbole des Apôtres n’a donc jamais été connu par ceux-ci ! Le seul enseignement des dogmes que l’on peut tirer des Ecritures se trouve dans l’Epître aux Hébreux qui se concentre surtout sur la « présentation sacerdotale du mystère du Christ » .<br /> <br /> Pour vous montrer l’évolution des dogmes au sein de l’Eglise catholique, il suffit de regarder l’exemple très explicite de la Trinité. Après avoir été considérée comme une hérésie au deuxième siècle, elle est maintenant l’un des principaux dogmes catholiques. En plaçant le Père au dessus du Fils, Jésus, Saint Paul et Saint Jean ne respectaient pas cette idée. En outre, la notion même de trinité a donc changé depuis sa fondation : au départ, elle était vue comme le syllogisme du Fils (l’historique) et du Père (l’absolu) donnant le Saint Esprit (l’appliqué et le personnel). Aujourd’hui les trois instances sont placées sur un même pied d’égalité. La croyance des ancêtres chrétiens n’est donc plus la même que celle des Chrétiens actuels. Est-ce toujours le même Dieu ?<br /> <br /> Le symbole ne contenait au départ que l’expression de l’adhérence à la chrétienté, la trinité entre autres. Vers le milieu du troisième siècle, la Sainte Eglise catholique vint se raccrocher à cette trinité en se faisant le corps des trois instances à la fois. On arriva vite à la célèbre formule « nul salut en dehors de l’Eglise » d’Origène qui sous tend la recrudescence de l’exclusivisme juif.<br /> <br /> Le credo, avant d’être un acte de foi, fut sans aucun doute une arme de guerre contre les hérésies, c’est-à-dire contre les doctrines repoussées par l’Eglise. A ce moment, la résurrection ne posait pas de problème, au contraire de la mort du Christ. C’est donc, entre autres, pour combattre les gnostiques que le credo répète, à quatre reprises, que le Christ est bien mort : la souffrance, la crucifixion, la mort, et l’inhumation. Comme pour accentuer cette opposition, on insiste encore sur la durée des trois jours. En affirmant que Dieu est créateur du ciel et de la terre, le credo veut encore aller à l’encontre du principe gnostique qui fixait à 365 le nombre « d’esprits supérieurs ». En parlant de la résurrection de la chair, l’Eglise s’oppose aussi à la gnose par son matérialisme charnel. Pour continuer sur sa lancée, l’Eglise insistera très fort sur l’aspect physique de Jésus : « conçu du Saint Esprit, et né de la Vierge Marie ». Pilate n’est d’ailleurs cité que pour accentuer la conception historique du Christ. <br /> <br /> En 350 naît la seule allusion morale contenue dans le credo : « la rémission des péchés et (…) la vie éternelle ». Cependant, Saint Cyprien affirmait : « que la rémission des péchés ne peut être donnée que dans l’Eglise, et que chez les hérétiques, où l’Eglise n’est pas, les péchés ne peuvent être remis. » L’Eglise s’est donc substituée à Jésus pour accorder le pardon. Ces deux tendances entrent, évidemment, en totale contradiction avec le message plusieurs fois répété de Jésus : « La Sagesse (de Dieu) a été reconnue juste pour tous ses enfants. »
L
Annexe 1 : Le Symbole des Apôtres<br /> <br /> <br /> « Je crois en Dieu, le Père tout-puissant,<br /> « Créateur du ciel et de la terre.<br /> « Et en Jésus-Christ, son Fils unique,<br /> « Notre Seigneur,<br /> « Qui a été conçu du Saint Esprit, <br /> « Est né de la Vierge Marie ;<br /> « A souffert sous Ponce Pilate, <br /> « A été crucifié, est mort et a été enseveli,<br /> « Est descendu aux enfers,<br /> « Le troisième jour, est ressuscité des morts,<br /> « Est monté aux cieux,<br /> « Est assis à la droite de Dieu le Père tout-puissant,<br /> « D’où il viendra juger les vivants et les morts.<br /> <br /> « Je crois en l’Esprit Saint,<br /> « En la sainte Eglise catholique,<br /> « À la communion des Saints,<br /> « À la rémission des péchés,<br /> « À la résurrection de la chair,<br /> « Et à la vie éternelle.<br /> <br /> « Amen. » <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> N.B. : L’exactitude des termes de ce texte étant cruciale pour notre travail, nous nous sommes attachés à comparer le contenu de diverses sources de diffusion de cet écrit dans la communauté des croyants d’aujourd’hui dont :<br /> • Symbole des Apôtres, in http://www.scouts-europe.org/progresser/prie/lectorat/symbole-apotres.shtml [en ligne]. <br /> • Symbole des Apôtres, in Missel des Dimanches, éd. collective des Editeurs de liturgie, Paris, 2005, p. 19.
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